La femme sans peur (21)

Par le 16 October 2012
dans Des histoires

Vous ne le savez sans doute pas mais, pour noël, je compte sortir en version kindle et papier, le volume 1 des aventures complètes de Trinity et de Speedy. Je suis en ce moment en pleine relecture et, je cherche la bonne couverture.

Pouvez-vous m’aider ? Avez-vous des idées ? Êtes-vous photographe ? Graphiste ? Si oui, n’hésitez pas à me contacter (jp AT revoperso.com) ou à laisser un commentaire ci-dessous. Si un cliché vu sur le net vous inspire, indiquez aussi le lien. Merci !

Cet article est la suite de la saga de Trinity Silverman, commencée ici.

Le reste de la journée est tranquille.

Trinity, dans sa chambre, continue à travailler sur sa présentation pour les grands patrons de MetaForex. L’après-midi est lui plus agité puisque, les yeux rivés sur son ordinateur portable, elle doit se battre contre le cours des devises qui monte et qui descend comme des montagnes russes.

Heureusement que ma modélisation du marché est fiable, se dit-elle. Sinon, j’aurais perdu beaucoup d’argent aujourd’hui.

Ceci dit, elle finit par remarquer qu’il y a quelque chose qui la gêne. Quelque chose qui s’est immiscé dans son esprit et qui ne veut plus la lâcher. Quelque chose qu’elle a refusé de voir jusqu’à maintenant.

Elle finit vite par comprendre que c’est la pilule qu’elle a donné à Christina, qui la trouble de plus en plus, les regrets commençant à la miner. En même temps, elle s’en veut de penser comme ça, avec autant d’égoïsme, car elle le sait, elle a fait la chose juste !

Aussitôt, de nouveaux doutes, apparaissent.

Comment je vais faire ? pense-t-elle. Il m’en faut à tout prix une pour la grande présentation donc cela veut dire qu’il va falloir que j’en économise une.

L’esprit cartésien de Trinity, ajouté au comprimé de ce matin, ont un effet calmant.

Demain, je peux éviter d’en prendre une, peut-être ? se dit-elle. Oui, il n’y aura pas de réunion particulière et je n’aurais qu’à rester tranquillement dans ma chambre.

Trinity se redresse un peu. C’est décidé, demain je n’en prends pas !

Elle frissonne quand même un peu.

Gianmarco.

Peut-être que son séminaire est terminé ? Elle n’aura plus besoin de le croiser. Et puis de toute façon, il la méprise. Il n’ y a qu’à voir comment il l’a complètement ignorée ce matin.

Trinity en rougit encore. Blessée.

“Ça suffit !” dit-elle tout haut. “Je ne vais pas me raccrocher à un inconnu dont je ne connais rien…”

Elle se lève et marche presque comme une lionne en cage dans sa chambre pourtant spacieuse. Elle s’approche du bureau et penche la tête au-dessus de la boite en plexiglas. Au beau milieu, Speedy est tranquillement en train de mâchonner un bout de champignon.

“Qu’est-ce que tu en penses toi ?” lui demande-t-elle.

Le petit escargot continue tranquillement à grignoter mais, ses antennes ont commencé à s’agiter, comme s’il était attentif aux vibrations de la voix de Trinity.

“Dis-moi Speedy, qu’est-ce que je vais faire de ma vie ?” Elle soupire. “J’ai envoyé balader mon boyfriend et ma mère. J’ai insulté l’un des clients les plus importants de MetaForex. Je marche à coup de cachets et pour une fois que je trouve un garçon qui me plaise vraiment, je l’humilie dans ce que les hommes ont, sans doute, de plus sensible : la peur d’être rejeté par une femme.

Un autre soupir. Speedy abandonne un instant son festin car il a capté des phéronomes de tristesse, ce qui rend impossible de savourer un bon plat. Ces petites molécules-là, elles s’immiscent partout et rendent difficile la jouissance de l’existence.

Fut-elle gastéropodienne.

“Qu’est-ce que je dois faire ? Quitter MetaForex ? Lancer ma propre boite ? Partir dans un long voyage ?….”

Cette dernière idée l’interpelle. Après tout, elle a quelques économies et un besoin intense de respirer.

Elle abandonne Speedy qui, ne sentant plus les phéromones et vibrations pessimistes, est bien content de pouvoir retourner savourer son champignon.

Trinity ouvre une nouvelle fenêtre dans son ordinateur et elle tape les mots “voyage” et “Salvador”. Distraitement, elle clique à droite à gauche, histoire d’en savoir plus sur la patrie de Christina. Peut-être que ce serait une bonne idée de faire un petit tour là-bas.

Plutôt que d’aller en Europe.

En Italie.

Elle tape du plat de la main sur la table.

Ça suffit ! se dit-elle en se levant brusquement. Elle passe rapidement dans la salle de bains pour se rafraichir le visage et elle se glisse ensuite dans un pantalon capri blanc qui lui arrive au-dessous du genou. Elle enfile un polo aux arabesques rouges, roses et oranges et complète le tout avec une paire de tennis plates, blanches également.

Avant de sortir, elle se regarde dans le grand miroir de l’entrée.

“Comment tu me trouves Speedy ?”

Elle sourit en pensant que le petit gastéropode est bien loin de ces considérations superficielles.

La porte claque derrière elle.

Cette fois-ci, le Strip est bondé.

Ce n’est pas comme ce matin où elle avait le trottoir pour elle toute seule. Maintenant, la foule déambule, bruyante et joyeuse sous le soleil. On entend toutes sortes de langues et il y a beaucoup d’enfants qui courent dans tous les sens.

Oui, pense Trinity, ce n’est vraiment pas la même clientèle que le soir.

Pourtant, dans cette foule, la jeune femme n’est pas à l’aise non plus. Elle se sent comme observée. Pendant une fraction de seconde elle pense à Gianmarco mais rejette aussitôt cette idée. Il est occupé avec ses conférences.

Arrête de penser à lui !

Elle regarde autour d’elle, mais rien. Il ne semble pas que quelqu’un s’intéresse particulièrement à sa personne. Trinity hausse les épaules. Elle se croit dans un film ou quoi ? Et puis d’abord pourquoi en serait-il autrement ? Elle est juste une femme, anonyme parmi des milliers d’autres sur un trottoir.

Tout ça l’énerve. Alors qu’elle arrive au niveau du Caesar palace, elle décide de rentrer à l’hôtel et fait demi-tour.

Elle parcourt quelques mètres. les yeux vagabondant et soudain s‘immobilise, tétanisée.

Là-bas, tout au bout de la rue, dans la foule, Nick Burr la fixe d’un regard mauvais.

Son cœur fait un bond.

Instinctivement, Trinity fait volte-face et se dirige vers le Caesar Palace dans lequel elle s’engouffre par la grande entrée. Avant que les portes ne se referment, elle a le temps de voir Nick Burr, avec son air sinistre, s’avancer vers elle.

Oh mon dieu ! se dit-elle.

Le bruit des machines à sous l’accueille. Elle accélère le pas et, un peu au hasard, tourne à droite au bout de la salle. Le grand couloir est plus silencieux et débouche sur une place intérieure, ronde, entourée d’arcades et coiffée d’une immense coupole.

Au centre, trône une monumentale sculpture, copie grandeur nature du célèbre David de Michel-Ange.

Mais Trinity n’a que faire de l’élégance des courbes du géant de carton-pâte. Elle fuit un ennemi et c’est son instinct qui la guide. Elle s’engage à grandes enjambées dans une sorte de petite avenue au sol de marbre immaculé.

Elle fait encore quelques pas, ralentit et puis, s’arrête.

“Une seconde,” murmure-t-elle, “j’ai bien pris un comprimé ce matin, moi. Alors, je ne suis pas sensée avoir peur.”

Un sourire se dessine sur ses lèvres.

Lentement, elle se retourne et, en regardant derrière, elle a tout le temps de voir apparaitre, devant la grande statue de David, un Nick Burr qui avance à grands pas.

Le visage de ce-dernier passe alors du sourire carnassier à l’étonnement benêt. Il s’arrête aussi, brusquement.

Il ne comprend pas.

Elle devrait être en train de s’enfuir, paniquée et tremblante, comme toute femme se comporte lorsqu’elle se sent en danger.

Les deux se dévisagent pendant une fraction de seconde avant que, d’un coup, tel un prédateur, Trinity, sourcils froncés, se lance à grandes enjambées vers son ennemi.

(A suivre)

(Photo : MDB 28)

Commentaires

7 commentaires pour “La femme sans peur (21)”
  1. Jacques says:

    Vous faites durer le suspense!
    Pourquoi le considère t’elle comme son ennemi, alors qu’il lui a donné ces cachets magiques? (Même si on ne sait pas exactement à quel prix!) Dans la mesure où elle n’en a presque plus, elle aurait pu essayer d’en savoir un peu plus, plutôt que de l’agresser?
    Mais il y a sûrement une explication logique à tout cela! 😀

    Pour la couverture: un escargot? des cachets? Il y a des photos sympas sur fotolia.com!

    Bonne journée
    Jacques(line:-))

    • Merci Jacques(line) pour les questions ! Cela me permet de voir ce que pensent les lectrices. Attention Nick Burr n’est pas celui qui lui a donné les pilules… 😉

      Et merci pour l’idée de l’escargot ! 😀

      • jacques says:

        Ah oui, flûte, j’ai confondu avec l’autre! Voilà ce que c’est de nous faire languir aussi longtemps.:D

        Nick Burr, c’est bien celui de la conférence? N’avait ‘il pas quitté la ville de dépit? Ou seulement la conférence? J’avoue que je ne sais plus!
        Bon, j’essaierai de ne plus faire de gaffe!

        • Bingo Jacques(line) !

          Tu as raison, il est supposé avoir quitté Las Vegas… donc c’est déjà corrigé par un conditionnel, qui tombe à point. Merci beaucoup. 😉

          PS : C’est super d’avoir des lectrices et des lecteurs à qui rien n’échappe… vraiment, merci tout le monde. 🙂

  2. Amibe_R Nard says:

    Oui, je vote aussi pour un escargot sur la couverture. 🙂

    Un escargot dévorant le sigle Forex (sauf si le sigle est Trademark) ?

    Parce que, le doute commence à s’insinuer en Trinity au sujet de son travail. (au moins dans cet épisode).

    Pour les cachets, il ne faudrait pas que ce soit assimilé à la promotion des drogues.

    Bien amicalement
    l’Amibe_R Nard

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