Aller à la limite

Par le 15 February 2010
dans Vous êtes bloqués?

Changer, avancer dans la vie, c'est comme plonger et suivre la ligne de fond, complètement concentré, pour atteindre l'autre bord, l'objectif !

J’ai l’habitude de parler de confort. De bien-être. De plaisir. Cependant, parfois il est nécessaire de sortir de son nid douillet et de prendre des risques, d’aller au-delà. Après tout, si on analyse l’expression, “être à la limite”, c’est un peu être au bord du gouffre, à la limite de la dépression. Et pourtant, je vais bien vous parler d’aller là où c’est difficile, là où ça fait mal.

Car la différence avec la dépression, c’est que le déprimé n’a pas choisi d’être dans cette situation. “Être à la limite” pour moi est un choix. Vous allez donc me répondre que je suis masochiste ! Pas du tout car le ou la masochiste va rechercher ses limites pour le plaisir de souffrir mais moi ce que je vous propose c’est de rechercher nos limites pour le plaisir d’avancer. Comment est-ce possible ?

Comme Icare

Lorsque nous étions enfants nous n’avions pas peur. En général, toute nouvelle expérience était la bienvenue car elle nous permettait de découvrir de nouveaux univers et ainsi d’apprendre. Mais en grandissant, nous nous sommes brûlés à plusieurs reprises, vous vous en souvenez tout comme moi. Parfois la douleur fait encore mal. Alors nous avons décidé que nous en savions assez, que ce n’était plus la peine de prendre de risques inutiles.

Analysez ce qui s’est passé dans votre vie récemment et recherchez la dernière fois où vous êtes allé à la limite. Cela peut être à la limite de vos connaissances, de vos peurs, de situations particulières, de cadres nouveaux. Attention, si le week-end dernier vous n’êtes pas allé pêcher les piranhas à mains nues dans les eaux de l’Amazone, je ne vais pas dire que votre vie est monotone. Parfois ce sont de tous petits risques qui ont beaucoup de signification. Comme de demander son chemin à un étranger ou juste de prendre un ascenseur. Les piranhas peuvent attendre. 🙂

Alors, quand vous jetez un oeil aux derniers mois ou années de votre existence, était-ce la routine ou, des poissons aux machoires affûtées qui vous “bouffaient” les doigts ? Il y a fort à parier que si c’était plutôt l’ennui, cela signifie que vous n’étiez pas à la limite mais plutôt dans une zone trop confortable pour apprendre.

Nos frontières

Car c’est bien ça le but de se mettre à la limite. C’est d’acquérir de nouvelles connaissances et ainsi de grandir. Que ce soit dans votre vie professionnelle ou personnelle, c’est le seul moyen d’éviter l’ennui et la stagnation.

Notre monde du travail évolue de plus en plus rapidement. Je sais, je vous rabâche sans arrêt ma vision d’une société d’Hommes fluides dans un très proche futur mais on y vient de plus en plus rapidement et, cela ne va pas ralentir. Alors si vous pensez que de rester assis au bureau, en faisant votre travail routinier va suffire, vous allez au-devant de grandes déconvenues. Pendant ce temps, d’autres, jeunes et moins jeunes, se recréent et avancent rapidement. Ce sont eux les gagnants, ce sont eux qui testent et dépassent leur limites.

Dans notre vie personnelle, c’est la même chose. Une vie de couple routinière devient fade. Deux compagnons ont besoin de se redécouvrir constamment. Marié ou pas, fiancé ou pas. Pensez à vos relations éphémères – peut-être un été – et rappelez-vous de l’intensité qui existait. C’est d’ailleurs pour cela que vous vous en souvenez encore. 😉

Dans une relation de couple, plus les années passent, plus la routine s’installe, c’est inévitable. Mais pour éviter de verser dans le convenu – la pire chose qui puisse arriver à un couple – pour réussir à garder de la fraîcheur et de la spontanéité, il faut aller de temps en temps à la limite. Bon d’accord, passons sur les piranhas, mais pourquoi pas un week-end surprise dans un coin inconnu ? La découverte d’un nouveau sport ensemble ?

Mes propres limites

J’ai toujours aimé voyager. Je crois que mes parents m’ont emmené pour mon premier voyage de la France au Portugal lorsque j’avais environ 6 mois. Le virus m’est resté, bien que chez moi ce ne soit pas la destination qui revêt le plus d’importance mais bien le fait de voyager et de prendre son temps.

Par contre, à une certaine période de ma vie, je me suis, petit à petit, sclérosé, roulé en boule et ne suis plus sorti d’une zone de 300 km de rayon pendant plusieurs années. Bien sûr, à ce moment là, ma vie n’était pas très passionnante, je n’étais pas quelqu’un d’intéressant et évidement ma vie sociale et professionnelle en subissait les conséquences. Dès que j’ai commencé à me “risquer” au-delà de cette zone, mon existence s’est à nouveau améliorée. 🙂

Un autre exemple tout récent, que connaissent ceux et celles qui sont abonnés à la newsletter révolutionnaire (c’est gratuit et c’est en haut à droite de cette page) est celui de ma résolution de courir pendant 2 mois, chaque dimanche matin à 5h00 avec ma compagne Takako. Pour moi c’est un vrai challenge, car cela fait très longtemps que je n’ai pas couru. Je préfère nager. Mais déjà, après un mois et demi, je peux sentir tout ce que ce test de mes limites m’a apporté.

A partir de cet objectif simple, j’ai ressenti une nouvelle énergie dominicale, j’ai recherché et découvert toute l’évolution derrière l’utilisation des jambes dans l’histoire des humanoïdes, la science et le danger des chaussures de sport et, une “nouvelle” façon de courir avec les Vibram Five Fingers, ces étranges “chaussons” à doigts sur lesquels je ferai bientôt un article. C’est déjà pas mal, non ?

Mais le plus important, c’est le fait d’aller ensemble dans le froid faire ce jogging matinal. Pas de piranhas à l’horizon, mais le sentiment de faire quelque chose de nouveau, d’excitant, qui brise un peu notre routine, qui ouvre de nouvelles conversations, qui crée de nouvelles complicités. 🙂

Et… hum, accessoirement, j’ai aussi appris à ravaler ma fierté puisque Takako me distance à chaque fois, et sans efforts. (Pour ma défense, je dirai qu’elle court depuis des années… et toc !).

L’extrême bord de la piscine

Comment aller à la limite ? Je ne vais pas vous prendre par la main, personne ne peut le faire, surtout qu’elle n’est pas trop difficile à trouver cette frontière. Le baromètre ? Dès que ça vous fait un petit peu peur, c’est dans cette direction qu’il faut aller.

Dans le cadre de votre travail, cela peut vouloir dire participer à quelque chose d’un peu différent. Faire une présentation sur un sujet nouveau ? Oui ! En plus vous ne faites que rarement des présentations ? Double fois oui ! Vous avez l’opportunité de participer à un stage dans un secteur proche ou étranger au vôtre ? Oui ! L’assistance sera internationale ? Encore une fois, oui ! Et ainsi de suite. Même chose avec votre copain ou votre petite amie. Ou votre compagnon. Ou alors votre épouse.

C’est un peu comme en natation, lorsque le nageur pro, super concentré, se positionne sur son plot de départ. Vous l’avez remarqué, il place ses pieds tout à l’avant, dans un équilibre précaire. Et ensuite, il continue à glisser tout doucement ses orteils qui vont délicatement agripper le rebord du plot. Après, il s’immobilise. Il est là, presque suspendu dans l’air, attendant le signal du départ qui va le libérer et lui permettre de tester ses limites.

La prochaine fois que vous sentez une peur de l’inconnu, pensez aux orteils de cet athlète. En douceur, positionnez-vous à votre limite. Respirez un grand coup et lancez-vous. Saisissez certaines des opportunités qui vous sont offertes. C’est l’occasion de vous connaître un peu plus. Et comme le nageur, vous découvrirez que, de l’autre côté de ce plot, de cette limite, il n’y a que la possibilité de battre ses records, de se dépasser.

Sauf si vous êtes poursuivi par les piranhas. Là, je vous suggère quand même de nager vite.

(Photo : jayhem)

Commentaires

21 commentaires pour “Aller à la limite”
  1. Nathalie says:

    J’ai essayé la piscine mais j’ai pas réussi à tenir le rythme :S ! j’ai encore 9 tickets sur le carnet de 12 que j’ai acheté ! et pour le jogging je suis passée à 3 fois par semaine au lieu de un jour sur deux ! et j’ai honte 🙁

  2. Jean-Philippe says:

    Merci pour ton commentaire que je sens très sincère Nathalie. 🙂 3 fois par semaine le jogging c’est bon ça ! Peut-être que ton objectif était trop ambitieux pour un début ? En te poussant à faire du sport tu as déjà franchi ta limite. 🙂

    Après il te faut comprendre pourquoi tu ne peux pas tenir ce rythme. Est-ce que c’est réaliste par rapport à ton emploi du temps ? Ou y a-t-il d’autres raisons ?

    Mais en général, nous humains, sommes très forts pour nous culpabiliser quand tout ne va pas parfaitement mais on oublie souvent de se féliciter pour tout ce que l’on accomplit. Alors, ce n’est peut-être pas ton ticket pour les Jeux Olympiques mais chapeau pour les 3 sorties par semaine ! 😉

  3. Charles says:

    Salut Jean-Philippe,

    Je te suis depuis un bon moment, et pourtant, il me semble que c’est la première fois que je poste un commentaire sur ton blog.

    Cet article est saisissant de bon sens, et j’ai ré-appris une bonne chose : aller là où ça fait peur, sortir de sa zone de confort. Je vais essayer d’appliquer le conseil dès ce mois, j’ai un domaine précis où il faut que je l’applique.

    Let’s go !

    Bonne continuation, et au plaisir de te relire.
    Charles.

  4. Jean-Philippe says:

    Merci beaucoup Charles ! Alors bonne chance à toi et tiens-nous au courant. Et si tu vois les piranhas, dis-leur bonjour de notre part. 😉

  5. Nathalie says:

    Merci Jean Philippe ! mais je me sens un peu fainéante ces derniers temps… Je dois impérativement me reprendre! C’est peut-être à cause de cette neige qui ne finit plus de tomber! et ce soleil qui doit en grève ici !!

  6. Jean-Philippe says:

    C’est vrai qu’avec ce froid ça n’encourage pas à aller courir. Ici à Tokyo je suis allé courir avec mes Vibram Five Fingers par -1 degré… je n’ai pas traîné !

  7. alteriche says:

    Merci pour cet article. J’attends avec impatience ton billet sur les Vibram Five Fingers!

    Le sport est je pense l’élément de base du développement personnel car c’est une synthèse d’un ensemble de valeurs, de vertus, de progrès.
    Je suis justement en train de préparer un billet là-dessus!

    J’avais une énergie folle grâce à la course à pied. Malheureusement, c’est dur de commencer, c’est dur de s’y mettre, mais… c’est tellement facile d’arrêter 🙁

  8. Laure says:

    “”Par contre, à une certaine période de ma vie, je me suis, petit à petit, sclérosé, roulé en boule et ne suis plus sorti d’une zone de 300 km de rayon pendant plusieurs années. Bien sûr, à ce moment là, ma vie n’était pas très passionnante, je n’étais pas quelqu’un d’intéressant et évidement ma vie sociale et professionnelle en subissait les conséquences.”””

    Je suis exactement dans cette période en ce moment…probablement une période d’introspection,dans laquelle je dois me poser certaines questions,remises en question etc…pas facile, car j’ai l’impression parfois d’avoir deux boulets aux pieds qui m’empêchent d’avancer.

    Merci pour cette article

  9. Jean-Philippe says:

    @alteriche Merci et tu as raison ! J’en suis presque à attendre mon dimanche pour l’énergie qu’il me donne. Et comme c’est un jour très occupé pour moi, ça tombe bien. 😉

    @Laure Même chose pour moi ! J’avais vraiment l’impression de ne pas vers quoi me tourner. J’ai dû essayer plusieurs trucs – comme faire des stages – pour trouver quelque chose qui me motive à me relancer. Ça va venir aussi pour toi. 😉

  10. LaForêt says:

    Bonjour Jean-Philippe,
    et bonjour à tous tes lecteurs
    J’avais laissé filer un paquet de jours sans prendre le temps de lire tes articles. Heureusement, le flux RSS veillait et m’informait du nombre de billets que je mettais de côté comme autant de caramels mous avant de décider de fondre sur le paquet. Enfin ce soir j’ai pris le temps de te lire (bon, ce sera du sommeil en moins mais j’aurai certainement tout le temps de dormir un jour) et me voilà toute guillerette. Merci pour tes billets, pour ton humeur joyeuse et constructive, pour tes traits d’humour plein de gentillesse.
    J’en suis même à attendre ton article sur tes super chaussures à doigts … alors que je n’ai aucun goût pour la course à pieds 😉
    MERCI

  11. Jean-Philippe says:

    @LaForêt Merci beaucoup pour ton commentaire qui me touche beaucoup parce que parfois, on ne sait pas toujours pour qui on écrit. En fait, j’aime le faire comme si je posais les mots sur la feuille pour quelqu’un de particulier. De recevoir un témoignage comme le tien, me donne une énergie renouvelée ! 🙂

    J’ai encore deux dimanches de course pour les tester et après, promis, je publie mon article sur les chaussures à doigts (Vibram Five Fingers, de leur vrai nom). 😉

  12. Julien says:

    Je me trouve actuellement dans une situation assez étrange, mais que l’on peut rapprocher de ce que tu décris. J’ai été blessé (pubalgie, contractée au football) pendant près de 18 mois. Je suis donc passé de 3 entraînements et un match par semaine à…rien du tout! J’ai donc perdu pas mal, en endurance et en masse musculaire.
    La situation est étrange car au jour d’aujourd’hui, j’ai pu reprendre dans une certaine mesure la pratique du sport mais les limites que je dois aller chercher, je les avais déjà dépassées. Je dois donc aller puiser au fond de moi-même pour courir 7km ou faire une série de 100 “abdos” alors que j’ai été capable d’en faire bien plus. La motivation est donc dure à obtenir car je devrais me réjouir de ce genre de performance alors que j’ai été habitué pendant plusieurs années à les considérer comme normales, moyennes.

    Pas facile donc d’aller à la limite quand celle-ci n’en est pas vraiment une!

  13. Jean-Philippe says:

    Merci Julien pour ton commentaire. 🙂

    Et si tu adoptais une attitude minimaliste ? En te disant que tu ne courras que 2km et que tu ne feras que 20 abdos ? Mais, à chaque foulée, à chaque mouvement d’abdos, tu les feras le plus consciemment possible, en appréciant chaque geste, en étant dans le mouvement. Et donc en appréciant la richesse de ton corps à la souplesse retrouvé. (Leçon numéro 2 de Garr Reynolds ?)

    Bon, là je te donne des conseils mais je suis loin d’y arriver. Si tu as lu mon article sur Vivre l’instant présent, je devrais être plus modeste. Mais après avoir parcouru ton blog, je t’en sens bien plus capable que moi. 😉

  14. Julien says:

    “Bien plus capable”, n’exagérons rien! 😉 Mais je pense que tu as raison, je devrais davantage me concentrer sur la qualité de ce que je fais et surtout, apprécier que je peux le faire (abdos interdits pour moi il y a quelques mois encore).

  15. cobaye007 says:

    Merci Jean-Philippe pour cet article qui me parle tout particulièrement. Je suis en train de sortir de ma zone de confort, un peu comme la belle au bois dormant qui se réveillerait après un long long sommeil. Et je dois dire que ça fait du bien !!

  16. Jean-Philippe says:

    @Julien Voilà ! Je crois que tu tiens le bon bout. 🙂

    @cobaye007 …en clair : tu vis ! 😉

  17. tout est vrai !
    5 ans que je me confortais dans mon paisible village. Et d’un coup, d’une relation, me voilà pendant 3 semaines dans le nord de la Thaïlande ! plus de 2500 km d’entrainement, des rencontres, des projets de travail et que du positif !
    http://www.flickr.com/photos/nico_bikerowcook/sets/72157629326159387/
    sortons de notre zone de confort, cela s’applique aussi au travail en changeant les méthodes !

  18. Jean-Philippe says:

    Merci pour ton commentaire Nicolas et belles photos ! C’est un superbe projet auquel tu as participé et je voudrais savoir s’il y a un site qui explique toute l’idée ? Merci. 😉

  19. pour le site le voilà peterpouly.com.

    Je l’ai réalisé et collabore à ces camp d’entrainement avec mon ami peter pouly.
    Nous organisons des stages d’entrainement à vélo ou autre sur-mesure (compétiteur ou cyclo touriste)/
    Notre point de base est à chiang rai, et à disposition une maison à louer avec le nécessaire. Le principe est que c’est du sur-mesure et découvrir à votre goût ce magnifique pays.

    Aussi, habitant en France, nous allons échanger et accueillir des thaïs. Ce que nous allons faire en Juillet et leur faire découvrir le tour de france pendant une semaine.

    J’adore. Je suis sorti de mon confort, et des choses heureuses se sont produites.

  20. Jean-Philippe says:

    C’est une super idée Nicolas, merci pour ces détails ! Oui tu as raison, tu es sorti de ta zone de confort et cela a créé de belles choses dans ta vie. 😉

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