Tirer le bon numéro

Par le 27 October 2011
dans Apprenti philosophe

Opalka, un sacré numéro

Il n’y a pas de quête inutile.

A partir du moment où nous sommes intéressés par ce que nous faisons, notre vie prend toute sa dimension. Et personne, je dis bien personne, ne peut venir nous dire de nous interrompre, de nous arrêter, de stopper notre effort.

Ce que nous faisons est beau, tout simplement, et on n’interrompt pas quelqu’un qui crée de la beauté, sinon c’est comme un crime.

Tirer le bon numéro devient alors tres simple.

Un…

Quand je parle de création, je prends le mot au sens vraiment large, car je n’ai pas la prétention de limiter le monde de la création aux seuls arts dits nobles.

Quel que soit votre domaine favori, vous avez le devoir d’y aller, de vous passionner pour ce que vous avez réellement envie de faire. Tirez bien votre numéro, pas celui des autres. Surtout n’écoutez pas les voix qui veulent vous empêcher de faire des choses sublimes (pour vous) et qui vous pousse vers une “carrière” plus terre à terre.

“Ça ne se fait pas” est une des expressions qui stoppent l’évolution.

Si on en était resté là, le progrès n’existerait pas puisqu’il faut sortir des sentiers battus pour faire de nouvelles découvertes. Alors si quelqu’un vous dit d’un ton péremptoire “ça ne se fait pas”, répondez-lui du tac-au-tac “Et bien ça commence avec moi” et foncez !

Une vie c’est fait pour être vécu.

Je répète par ce que c’est trop important : une vie c’est fait pour être vécu !

Autrement, à quoi bon être né ? Comme moi, vous n’avez rien demandé à personne et là, soudain, vous voilà né, étiqueté d’un prénom, d’un nom de famille et d’une date. Vous êtes donc un numéro. De plus vous héritez d’un plus ou moins lourd passé familial et, selon la géographie, de plus ou moins grandes chances de survies.

Alors ?

Pourquoi faudrait-il rentrer dans les schémas sociaux créés pas d’autres n’ayant qu’un seul but : vous soumettre.

Je sais que certains parmi vous ne seront pas d’accord avec ce point mais je persiste : la plupart des gens n’ont qu’une envie : vous soumettre. A leurs rêves, à leurs ambitions manquées, à leurs besoins. Que ce soit un parent proche ou un prof, une multinationale ou un gouvernement, une religion ou une idéologie, tout le monde est prêt à vous embrigader…

…et en général, ça marche.

Sauf pour vous puisque vous êtes encore en train de lire cet article ! 🙂

N’oubliez pas que dans le titre de mon blog il y a le mot “révolution” et même si je ne l’entends pas de manière violente, on peut dire “non” avec fermeté au conformisme.

Deux…

Alors voilà, lorsque l’on naît, on n’a rien demandé à personne et pourtant, en général, nous allons être formatés pour prendre certaines directions, ou plutôt, non-directions.

C’est pour cela que je maintiens ma phrase de tout à l’heure, vous vous en rappelez ? Celle que j’ai répété deux fois.

Allez-y, redites-la moi sans regarder en haut de votre écran…

“La vie, c’est fait pour être vécu.”

Et pas d’excuses ! Car à partir du moment où vous portez le blâme sur un autre, vous perdez votre indépendance, votre liberté, votre capacité à créer. Vous vous soumettez ainsi à quelqu’un (un parent, une chaine de télé ou un état) et donc vous entrez dans la sphère infernale des plaintes, des pleurs et des reproches. Vous gaspillez toute votre énergie qui aurait été bien plus utile sur votre projet.

Encore une fois : il n’y a pas de quête inutile, dès qu’elle vous passionne.

Même si votre idée est bizarre, saugrenue, atypique, allez-y ! Le numéro que vous avez tiré est le bon. Ainsi, c’est par l’exploration qu’on découvre de nouvelles choses. Pas en restant tranquillement chez soi à refaire la même chose avec ennui.

Maintenant, pas demain, c’est le moment de reprendre l’un de vos vieux rêves, de le dépoussiérer et de l’explorer avec un grand sourire.

Ce n’est pas une question de moyens, car on en trouve toujours si on le veut vraiment, ce n’est pas une question d’autorisation de qui que ce soit, ce n’est pas une question d’intelligence.

C’est juste une question de vous avec cette date, ce prénom et ce nom éphémères. Ce grand numéro qui vous colle à la peau. Un jour, comme moi, vous ne serez plus là, mais en attendant, vous avez encore l’opportunité de faire plein de bêtises (aux yeux des biens-pensants) et d’accomplir des choses surprenantes (aux yeux des vivants).

Trois…

Je parle de temps en temps de peintres parce qu’il nous surprennent souvent par leur parcours inhabituels ou parce qu’ils nous rassurent sur nos propres capacités à faire jaillir nos propres étincelles.

Un matin de 1965, un jeune peintre franco-polonais de 34 ans, Roman Opalka, eut une idée saugrenue pour sa prochaine œuvre. Il prit une toile vide, assez grande, d’à peu près deux mètres sur un mètre quarante. Se plaçant, tout en haut à gauche. Utilisant un pinceau fin, il écrivit à la peinture blanche, en tout petit, le chiffre “1”.

Juste à côté, il traça le chiffre “2”. Et ensuite “3”, “4”, etc. Il continua ainsi sa suite de numéros, revenant à la ligne lorsqu’il était arrivé bout du tableau pour la continuer. Ayant atteint le bas du tableau, n’ayant plus de place, il se releva, apparemment satisfait de son travail.

Mais il ne s’arrêta pas là.

Il se dirigea vers un autre tableau de même dimensions et reprit sa suite de numéros là où il l’avait laissée sur le tableau précédent.

C’était là son projet.

Écrire nombre après nombre, tableau après tableau, jusqu’à sa mort.

Ça donne à réfléchir, non ?

On ne peut pas rester insensible, on ne peut pas ne pas avoir de réaction face à l’idée de Roman Opalka. Ça fait réagir rien qu’en y pensant. (“Incroyable !”, “Quel idiot !” ou alors “quel génie !”)

C’est pour cela qu’il ne faut écouter personne. Faites selon votre idée, votre passion ou le feu qui brûle en vous. Quel que soit votre âge, c’est toujours le bon moment pour commencer. Le plus important, c’est de provoquer des réactions, de faire réfléchir les gens, et de les aider à faire eux-mêmes des choses qui les passionnent.

“5607249” est le dernier nombre que Roman Opalka ait écrit, il y a presque trois mois, avant de s’éteindre, à l’âge de 79 ans.

Une vie vraiment vécue ?

Oui, c’était le bon numéro.

PS : Merci à Éric Mainville pour l’inspiration (numérale ? numérique ? numéraire ? 😀 )

(Pour en savoir plus sur Roman Opalka : site officiel, wikipédia.)

Commentaires

16 commentaires pour “Tirer le bon numéro”
  1. je trouve cela impressionnant l’histoire de Opalka…je pense qu’il faut savoir vivre ses rêves au travers de sa passion…la passion est vraiment le moteur de nos vies…Revez les yeux ouverts…

  2. Jean-Philippe says:

    Merci beaucoup Jérôme pour ton commentaire ! Oui, tu as raison, c’est exactement ça. Mais, c’est plus facile à dire qu’à faire. Beaucoup pensent que l’art d’oser est difficile à conjuguer au présent. 😉

  3. Sorin says:

    Bonjour,

    L’idée qui me vient à l’esprit en lisant cet article c’est qu’à la base, nous sommes tous des créateurs. Oui, tout ce qui nous entoure a été imaginé et crée par quelqu’un.

    Je répète : on n’y pense pas mais, tout le monde matériel qui nous entoure c’est le fruit de l’imagination de quelqu’un, qui s’est matérialisé.

    Pensez comment rendre service aux autres, sans rien attendre en retour et probablement que vous allez réaliser, à quel point vous êtes doté de créativité.

    Merci Jean-Philippe !

    Amicalement,

    Sorin

  4. Jean-Philippe says:

    Merci Sorin pour ton commentaire ! Ce que tu dis est très juste et cela n’inclut pas tous les échecs (bien plus nombreux) qui ont conduit à ces inventions. Donc il faut avancer, faire des erreurs (beaucoup ! d’où le besoin d’être passionné) et ainsi trouver sa voie. 😉

  5. Patricia says:

    Oh, magnifique cet article Jean-Yves, il est tellement vrai et traduit l’essence de la vie. Moi, j’ai laissé mon métier d’infirmière pour vivre de ma passion : la santé et le bien-être par le développement personnel, j’ai aussi complètement réaménagé ma vie personnelle.
    Et maintenant tout les jours dans mes consultations je vois des gens malades de ne pas oser vivre leur rêve, leur vraie vie. Je les aide à passer outre le regard des autres, outre leur manque de confiance en eux et dans la vie, à se libérer de leur culpabilité et des pseudos obligations qu’on leur a attribué… Et bien souvent leur santé et leur état d’être s’améliorent considérablement, et s’accompagne de petites ou grandes révolutions.
    S’engager sur la voie du changement demande du courage, mais tout le monde peut choisir entre subir en victime, ou vivre en accord avec lui-même.
    A chacun de voir ce qui lui procure le plus de bénéfices !
    Vive la révolution (personnelle)!!!

  6. Patricia says:

    oups ! J’ai fais des fautes d’orthographe prise dans la passion ! Pardon pour les lecteurs.
    C’est ma faute,
    Ma très grande faute d’orthographe,
    Voici comment j’écris giraffe.

    Jacques Prévert

  7. Jean-Philippe says:

    Merci beaucoup Patricia et bravo pour le virage que tu as accompli dans ta vie professionnelle ! C’est important d’avoir des exemples comme le tien pour faire comprendre aux autres tout ce qu’il est possible de faire. 🙂

    Ah, et puis je dirai à Jean-Yves, qui qu’il soit, d’arrêter de se faire passer pour l’auteur des articles de ce blog. 😀

  8. Patricia says:

    Oh mille pardons Jean-Philippe ! c’est bien sur à toi que s’adresse les compliments, ce Jean Yves a réussi à s’immiscer entre deux neurones pour me faire déraper sur le clavier, je ferais bien attention à l’empêcher de nuire la prochaine fois !

  9. Jean-Philippe says:

    Ah, je le savais que j’avais un rival ! Jean-Yves, où que tu te caches, je te vaincrai ! 8)

  10. Xavier says:

    Bonjour, je decouvre votre blog et il a bien vite ete ajoute a mon Google Reader! ;o)

    J’aimerais reagir a cet article car il me vient toujours la meme reflexion lorsque je lis ces conseils quant a “vivre sa passion” …

    Les gens qui ecrivent a ce sujet mettent toujours en avant qu’aucune excuse n’est valable pour ne pas le faire …

    Mais je trouve ce precepte extremement egoiste … Je m’explique …

    Nous ne vivons pas seul! Nous avons des conjoints, des enfants, de la famille proche, des amis, des collegues, … Et le fait de vivre en societe amene toute une serie de “contraintes”, d’obligations, … liees au choix de vie sociale que nous avons fait (ou avons du faire)

    Prenons le cas de la vie en famille : il faut faires les courses, preparer les repas, surveiller les devoirs, conduire aux diverses activites, nettoyer,la maison, s’occuper du jardin, etre present pour l’autre, … Toutes une series de taches pour lesquelles les autres comptent sur nous … Et il n’y a que 24h dans une journee et 7 jours dans la semaine … Ce sont la pour moi des raisons valables qui peuvent pousser a ne pas pouvoir vivre sa passion … Et on pourrait trouver ce genre d’arguments dans d’autres cercles sociaux.

    Dire “je decide de vivre ma passion quoiqu’il en soit” c’est un peu dire “merde” aux autres, non?

    J’ai beaucoup d’amis independants qui me conseillent tout le temps de “faire le pas” moi aussi … C’est tres tentant! Sauf que je ne peux pas imposer a ma famille de quitter le confort de notre maison actuelle si mon activite ne decolle pas et que nous nous retrouvons sans les rentrees financieres pour payer le pret de la maison …

    Un autre aspect qui me chiffonne toujours un petit peu est le fait d’avoir une “passion” … J’ai pleins “d’interets” (trop peut-etre), mais je ne pense pas avoir une “passion”. Je m’interesse regulierement beaucoup (du genre a ne penser qu’a ca) pour 1 sujet … mais ca ne dure jamais tres longtemps : soit les realites mentionnees ci-dessus reprennent le pas, soit un autre sujet tout aussi “digne d’interet” surgit et relegue le premier aux oubliettes …

    Quelle definition donneriez-vous a “passion”?

    Le but de ce commentaire n’est pas de critiquer votre article (vu le nombre de gens qui pronent ces idees, il doit y avoir du vrai dedans), mais de nourrir ma reflexion avec vos reponses et avis … ;o)

  11. Jean-Philippe says:

    Merci beaucoup Xavier pour ce long commentaire dans lequel tu avances des arguments tout à fait corrects. C’est vrai, tout ce que tu dis est juste et je ne trouve rien à y redire. 🙂

    Pourquoi ? Parce que c’est ta réalité. A mon avis, tu as l’air de bien vivre ta vie telle qu’elle est et aussi il me semble que ta structure familiale est solide. Ainsi, “l’appel du large” n’est pas aussi tentant ou attirant. (Attention, je ne connais pas les détails de ta vie privée et je fais sans doute des erreurs de jugement, mais cela me permet de brosser un exemple parmi d’autres.)

    Ce qu’on veut tous et toutes dans la vie c’est nous épanouir et vivre bien. Il y a des millions de façons de le faire. La tienne est aussi valable que celle de celui qui change tout pour recommencer à zéro.

    Le plus important, à mon sens, c’est de ne pas se plaindre. Nous faisons des choix dans une direction ou une autre (ou nous n’en faisons pas !), et cela a des conséquences. On ne peut pas ensuite venir dire que cela ne nous plait pas, qu’on voudrait changer mais qu’on ne peut pas, etc. Un peu comme le héros de Como el viento, au début.

    On peut agir (ou pas), c’est tout. Toi tu ne te plains pas, tu penses aux réactions de ta famille et peut-être que cet appel n’est pas aussi fort. Alors si ta vie est agréable comme ça, tant mieux pour toi ! 😉

    Enfin, en ce qui concerne les passions, peut-être que mon article sur les scanneurs t’apportera des éléments de réponses. 🙂

  12. Xavier says:

    Merci pour ta reponse …

    J’ai decouvert le billet sur les scanneurs apres celui-ci (mais je ne l’ai pas encore lu). Il a l’air effectivement assez interessant …

    Je suis assez d’accord avec ta reponse, mais elle ne me semble pas repondre a mon commentaire. Je ne me suis peut-etre pas bien exprimé.

    Tu dis “on peut agir (ou pas), c’est tout.” … Je dirais (ou voulais dire dans mon commentaire) “on peut agir, on peut ne pas agir, mais souvent aussi on peut ne pas pouvoir agir alors qu’on le voudrait”.

    Je ne peux pas me plaindre de ma situation (ce serait indecent) mais elle ne me satisfait pas pour autant … Il y a plein de points que je voudrais pouvoir changer … Mais cela entrainerait des consequences pour mon entourage que je n’ai pas le droit de leur imposer … (je suppose que je pourrais leur demander leur avis, mais meme cela n’est pas valable dans tous les cas : comment demander a un enfant de 6 ans son avis sur qqch qui pourrait en fait ne l’impacter que bien plus tard dans sa vie?)

  13. Jean-Philippe says:

    Tu t’étais exprimé clairement Xavier, c’est ma réponse qui n’était pas assez précise. 🙂

    Tu fais des choix. Tu choisis de ne pas changer certaines choses dans ta situation. C’est normal. On peut tous et toutes supporter un certain niveau de concessions. Mais parfois on atteint un niveau où des changements sont vraiment nécessaires sous peine de déprimer.

    Comme tu l’as bien dit, il faut communiquer avec les siens pour trouver des solutions. Si la relation est stable, cela sera plutôt facile, puisqu’au final, cela bénéficiera à tous. Si la relation est basée sur le “besoin” ça risque évidemment de mal se passer (d’où souvent des “mal être” dans les couples).

    Quant aux enfants, il ne faut pas les sous-estimer. Je crois qu’en leur expliquant les choses à leur niveau cela se passera bien. C’est même un bel exemple à leur donner que de leur montrer leur papa qui ose quelque chose de différent, qui ose tenter, sans être certain de réussir son pari, quel qu’il soit. 🙂

    Plus tard, eux-mêmes n’auront pas peur de l’inconnu, de nouvelles situations, de prendre des décisions difficiles et ça, c’est un magnifique cadeau à leur faire. 🙂

    PS : Je n’ai pas la science infuse. C’est juste mon avis, donc si quelqu’un d’autre veut partager son expérience, il ou elle est le/la bienvenu(e). 😀

  14. Xavier says:

    Merci pour cet echange … faut que je lise les scanneurs …. ;o)

  15. hiba says:

    aaapres avoir lu cet article je suis tout de suite parti terminé un tableau

  16. Jean-Philippe says:

    …et on peut voir le résultat ? 🙂

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