Je suis différent

Marcher et parler pour mieux se connaitre

Lorsque je me trouve dans un des cafés de Tokyo ou de Yokohama en train de travailler sur mes articles, parfois je me dis : “Je suis vraiment différent.”

Bon, ne souriez pas, c’est vrai qu’un occidental – ou un gaijin comme on dit ici – au milieu d’un océan d’asiatiques, ça se remarque.

Mais à vous aussi cela vous est sans doute arrivé de vous dire que vous n’étiez pas comme les autres. Et vous ne vivez pas au pays du soleil levant.

Alors sommes-nous vraiment différents ?

Tous et toutes pareils

Bien sûr, nous avons un caractère différent, un physique différent mais ce n’est pas de cela dont je parle. Ce qui m’intéresse, c’est cette impression intime, au fond de soi, que l’on n’est pas, le ou la même que les autres.

Ce sentiment est très fort pendant l’adolescence. C’est une façon de se démarquer. De s’affirmer. De se montrer unique. Et donc intéressant. Peut-être même attirant. 😉

Mais ensuite, lorsque l’on devient adulte où passe cette prétendue différence ? Où va cette unicité ? On a finalement des collègues de bureaux qui s’habillent à peu près comme nous, qui font à peu près le même boulot que nous et qui prennent leurs vacances en même temps que nous. Le côté rassurant de la chose, de faire partie d’un groupe ne peut que nous encourager à continuer dans ce sens. Et pourquoi pas ? Je ne blâme pas ceux qui choisissent cette voie, si cela leur convient.

Bref, nos manières de nous différencier deviennent alors plus matérielles et extérieures – comme avec une nouvelle voiture ou une nouvelle paire de jeans – qu’intérieures et basées sur l’expérience.

Tous et toutes différents

Par contre, il est dommage que cette solution soit instillée dès notre jeunesse comme “la” voie royale d’une vie riche et heureuse.

D’autre voies sont possibles. Je ne dis pas qu’elles sont meilleures ou moins bonnes. Je pense que l’on devrait laisser le choix à chacun. Et là, on serait surpris par le nombre de personnes qui choisiraient une voie divergente, découvrant ainsi qu’ils ou elles sont différents, qu’ils ou elles sont uniques dans leurs souhaits.

Nos gènes sont identiques, et même à 95% similaires à ceux du chimpanzé. Par contre, ce qui se passe dans notre cerveau, l’unicité de notre expérience passée fait de nous des êtres aux envies variées. Vouloir caser tout le monde dans le même moule relève de la cruauté… que l’on s’inflige souvent soi-même. Cela expliquerait bien le stress que nous vivons lorsque nous savons que nous ne sommes pas à notre place, en train de faire ce que nous devrions faire.

Lorsque je suis sur ma terrasse de café nippone et que je me dis “Je suis différent”, je ne le fais pas avec arrogance. C’est juste un constat. Celui d’un scanneur qui essaie de trouver sa place dans un monde qui me semble toujours en retard d’un train, qui en est encore à celui de la révolution industrielle.

Donc, vous aussi vous êtes différent – autrement je serais réellement arrogant ! – même si vous l’avez peut-être un peu oublié. Il y a des possibilités, des envies, des choses que vous voulez, que vous pouvez affirmer. N’attendez pas trop pour les sortir, pour les exprimer. Notre monde en a besoin.

Pour cela, vous n’avez pas nécessairement besoin de tout envoyer balader. Sa différence, cela peut s’exprimer par un hobby, pour peu qu’il vous comble. Cela peut se faire sentir par les voyages, un bon moyen de comprendre notre différence et surtout celle des autres, et de la respecter.

Mais si vraiment vous n’y tenez plus, alors oui, partez, changez, vendez tout et recommencez quelque chose, quelque part. Ainsi, essayez de mieux vous connaitre.

Tous et toutes virtuels

D’un autre côté, il existe aussi des personnes qui se disent différentes, qui se pensent différentes, mais qui ne font pas un réel effort pour changer leur situation. Si vous êtes en train de refuser toute interaction avec d’autres, si vous vous isolez en vous drapant dans votre différence, vous faites 2 grosses erreurs. Je le sais, je suis passé par là, à un moment de ma vie.

D’abord vous n’avez vraiment rien de spécial, vous êtes plutôt ennuyeux et votre seule façon de vous démarquer, c’est juste d’affirmer que vous êtes particulier, sachant que derrière, il n’y a rien. Ensuite, en vous isolant dans votre soit-disant unicité, vous perdez toutes les occasions d’interaction sociale qui vous permettraient justement d’enrichir votre personnalité et de la rendre un peu plus intéressante.

En clair, vous ennuyez les autres et vous vous faites du mal.

Les réseaux sociaux, par exemple, sont bien pratiques pour faire de nouvelles connaissances. Malheureusement, si on reste caché derrière le virtuel, si on reste drapé dans quelques chose de fictif, cela ne nous fera pas grandir. Au bout du compte, seule une rencontre “dans la vraie vie” nous enrichira. Ici par exemple, j’essaie toujours de rencontrer les blogueurs français de passage dans la capitale nippone. Même si le contact n’est pas long, il y a toujours un plaisir dans l’échange.

Je sais que nous avons tous et toutes des emplois du temps ultra chargés. Je sais qu’une rencontre c’est loin d’être la garantie d’une amitié – voire plus – pour toujours. Mais si nous ne tentons pas, nous ne changerons pas.  Alors, laissons-nous aller, car paradoxalement, plus nous rencontrerons, plus nous deviendrons uniques.

Tous et toutes nés pour être vivants

Donc, si nous nous ouvrons aux autres, si nous accumulons les expériences particulières, nous enrichissons notre personnalité et devenons vraiment différents.

Dans notre monde citadin surpeuplé, souvent nous doutons de notre unicité. Sommes-nous juste des numéros ? Pour les administrations, oui. Pour les autres êtres humains que nous avons pris le temps de rencontrer, non.

Notre matériel génétique est le même mais notre potentiel est unique et tout cela commence dès la naissance.

Dans une maternité, lorsque un nouveau bébé apparait, là, personne ne doute de son unicité, surtout pas ses parents. Pour rien au monde ils ne diraient qu’il n’a rien de spécial, que c’est un nourrisson banal, commun, ordinaire.

Non, bien au contraire, son père et sa mère le savent. Il est unique. Il sera différent !

Comme vous. 😉

(Photo : notsogoodphotography)

Commentaires

12 commentaires pour “Je suis différent”
  1. David says:

    Salut Jean-Philippe.
    Je pense que je comprends bien ce principe de différence que tu exprimes. Cependant, il reste du chemin entre le moment où l’on comprend que l’on nait différent et où on l’assume. Par assumer, je veux dire une sorte de processus comme “identifier sa différence, la comprendre, la maîtriser puis l’exprimer pour mieux l’exploiter”.
    Il faudrait que je me replonge dans tes écrits, mais j’ai toujours l’impression que l’on nous incite à exploiter notre potentiel, alors que nous sommes déjà bien nombreux à ne pas connaître ce fameux talent.
    Bien sûr il n’y a pas de méthode clef. Il faut faciliter l’introspection, tester, expérimenter, vivre tout simplement. Mais l’impatience est souvent mère de frustration.

  2. Jean-Philippe says:

    Merci beaucoup David pour ton commentaire ! Tu as parfaitement raison, nous passons beaucoup de temps à parler de potentiels, de talents, de savoir-faire mais nous ne donnons pas de formule magique pour les découvrir. Parce qu’en fait, je pense qu’il n’y en a pas et tu le sais très bien puisque tu donnes les clefs de cette découverte dans ta réponse en parlant d’expérimentation.

    La frustration vient du fait qu’on nous demande très jeune de choisir une voie, une filière. Certains savent très tôt ce qu’ils désirent devenir, alors que la majorité d’entre nous, tâtonnons et changeons beaucoup au fil des ans. C’est la situation du scanneur.

    En ce moment, j’écris et je continue mes recherches sur la “scannitude” et j’espère que je pourrais apporter quelques pistes à ceux et celles qui cherchent des solutions. 🙂

  3. AMie says:

    On n’est riche que de sa vie…

  4. Jean-Philippe says:

    Merci AMie ! En fait, tu résumes très bien l’article… j’aurais pu faire plus court. 😉

  5. Rémy Bigot says:

    Pour ma part, je me sens différent depuis un moment maintenant.
    Ma vie prend un virage complètement hors vie habituelle, mais ça me plait !
    Je suis en train de trouver ma voie, loin de patrons et autres donneurs de leçons ^^

  6. Jean-Philippe says:

    Merci pour ton témoignage Rémy !… Alors, on est au moins deux ! 😉

  7. D’une voie je crie “vive les amateurs” et tous ceux qui ne savent pas ou qui sont là par hasard.
    Bien sûr que je ne peux pas faire autrement que de me sentir différent, puisque je pars toujours de moi, et ne pourrais jamais partir d’autre part. La différence se fait peut-être dans la direction empruntée.

  8. d’une voix pardon. Et non à la tyrannie de l’expérience

  9. Jean-Philippe says:

    Merci Duncan pour votre commentaire ! C’est très juste ce que vous dites sur la direction empruntée. Alors empruntons, empruntons ! 😉

  10. chrissie says:

    une réflexion jaillie tout droit de mon esprit labyrinthique:
    à force d’osciller entre “je suis différente,je le vois bien” et le “je veux être aimée, recevoir comme tout le monde de l’affection, avoir un papa et une maman aimant, capables d’amour inconditionnel même si leur enfant est différent” et puis les tourments émotionnels de l’adolescence, l’hyperperception des choses que j’ai toujours eu, surtout quand “ça cloche”
    bref à 20 ans j’en avais conclu que j’étais “conne et moche”
    (désert affectif et amoureux, mal dans sa peau et j’en passe)

    heureusement j’ai dépassé ce stade, enfin nous sommes 27 ans plus tard 😉
    et je me gausse presque d’être effectivement différente et je me demande pourquoi on peut passer autant de temps et d’énergie à vouloir se fondre dans la masse, à se conformer, “chassez le naturel il revient au galop”
    de toute façon CELA EST, la différence est là, “deal with it” comme diraient les anglophones 😉
    il s’agit de cultiver son jardin, de faire de belles fleurs

  11. Thomas says:

    “Plus nous rencontrerons, plus nous deviendrons uniques.”

    Je pense également que ce sont les rencontres que nous vivons (à travers nos lectures, notre regard et les personnes) qui développent notre richesse et notre unicité.

    Et ce qu’il y a de fantastique, c’est que chaque rencontre façonne quelque chose de nouveau, un peu comme à l’image d’un univers dont on ne connaîtrait pas la fin…

    Merci pour ces opportunités réflexives que tu offres à travers ton blog et ce que tu partages ! C’est toujours un festin de te lire.

    • Merci beaucoup pour le compliment Thomas !

      Et tu en parles toi-même aussi bien que moi. L’image d’un univers dont on ne connaîtrait pas la fin, me titille sérieusement. 😀

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