La peur de réussir

Que faire? Que décider? Que mettre dans la colonne de droite? (Euh... à mon avis tu penses trop, là)

Comment peut-on avoir peur de réussir? Ça ne paraît pas logique car évidemment nous avons tous vraiment envie de réussir, non? On veut tous finir ce site web qui nous tient à coeur, inviter cette fille ou ce garçon au ciné, négocier cette augmentation méritée ou perdre ces kilos superflus.

Regardez de plus près certains buts que vous vous étiez fixés dans le passé. Qu’est-ce qui a fait capoter le projet? Pourquoi avez-vous abandonné? Ah évidemment, il y a eu des évènements imprévus, des problèmes qui ont surgi, c’est vraiment pour ça qu’on a dû s’arrêter. Nous, on voulait vraiment réussir! Ah oui? Et les autres alors? Ceux qui ne sont pas plus doués que nous et qui parviennent à finir leurs projets avec une “aisance” désarmante? Pourquoi eux et pourquoi pas nous?

De même que le bras du joueur de tennis tremble souvent au moment de la balle de match, la peur de gagner est quelque chose de très réel. Elle bloque notre élan et la plupart d’entre nous vivons inconsciemment cette peur du succès. Je vous propose d’en examiner les mécanismes et de découvrir une des solutions simples pour être sûr que vous réussirez à finir votre prochain projet.

Les multiples facettes de la peur du succès

Réussir son projet, atteindre son but ou être plus heureux, ont une définition différente selon chacun. Mais tous ces objectifs vont créer des changements dans votre vie. Quand vous gagnerez beaucoup plus d’argent, vous ne percevrez plus le monde de la même manière. Quand vous aurez perdu vos kilos en trop, vous serez une personne différente. Comment vos amis réagiront-ils lorsqu’ils vous verront svelte alors qu’eux sont restés les mêmes? Quand votre compagnie fera de beaux bénéfices, comment vous jugera votre entourage quand il vous découvrira avec certains signes extérieurs de richesse? Il n’est pas certain qu’ils soient tous sincèrement heureux pour vous mais plutôt jaloux de votre courage. Avancer dans la vie, provoque donc des changements. Ces changements ne plairont pas à tous. Nombreux sont ceux qui, parmi nous, préfèrent éviter ces frictions qui déstabilisent et nous mettent dans des situations où nous devons faire face à de nouvelles responsabilités.

Depuis tout petit, je voulais devenir animateur radio. J’avais réussi à décrocher des petits boulots dans de petites radios associatives mais ce n’étaient pas des contrats stables où je gagnais bien ma vie. La preuve? A l’époque j’habitais chez mes parents. L’envers de la médaille était que je me trouvais dans une situation très confortable, avec chambre et repas fournis, mon linge étant lavé et repassé. Ma motivation pour accéder à un contrat professionnel en radio était grande mais d’un autre côté cela voulait dire que je devais quitter le cocon familial, pour une vie où je serais responsable de mon quotidien. De toute évidence, c’était quelque chose auquel je ne voulais pas faire face.

Cette résistance au changement, au progrès, cet auto sabotage peut prendre d’autres formes. On ne veut pas blesser les autres par son succès. Alors on s’empêche d’avancer en créant de faux problèmes ou des excuses qui empêchent d’atteindre son but. On se tient aussi un discours qui dévalorise, du style: “qui je suis pour réussir? Je ne le mérite pas.” Également, il arrive que certains se disent qu’une fois le but atteint, que va-t-il se passer? “Et si je n’étais pas satisfait? Et si après je n’avais plus aucune motivation?” C’est vraiment l’inconnu et ça fait peur.

La clef du succès est dans notre tête

Il est normal de ressentir cette peur. C’est un phénomène naturel qui nous a bien aidé pendant notre évolution d’être humain et nous a protégé de l’inconnu. De nos jours, nous réagissons encore de la même manière. Cet inconnu n’est plus physiquement dangereux comme les animaux aux dents longues de notre préhistoire mais ça, notre instinct ne le sait pas. L’équation: changement = danger, fonctionne toujours et plus on évite d’affronter ses peurs, plus elles se renforcent, nous bloquant dans une situation ou on ne peut pas pleinement s’exprimer.

Il est triste de se retrouver bloqué toute une vie dans une profession ennuyeuse. Il est dommage de ne pas aller parler à cette fille ou à ce garçon qui nous plaît. Il est regrettable de ne pas aller à la gym et de garder ses kilos en trop. Qui est gagnant dans cet auto sabotage? Personne, car vous ne rendez service ni à vous-même, ni à votre entourage. En y regardant de plus près, cette peur du succès est-elle si impressionnante?

L’échelle des valeurs

Il y a plusieurs solutions pour briser ce blocage mais l’une des plus efficaces est de lister les avantages et les inconvénients de cette réussite. Prenez une feuille de papier et un crayon. Vous pouvez aussi faire cet exercice sur votre ordinateur. Divisez la feuille en deux colonnes. À gauche listez tous les avantages que vous recevrez si vous atteignez votre but. À droite, faites le contraire. Notez tout ce que vous perdrez si vous réussissez. Soyez très précis, utilisez des exemples concrets.

Par exemple si je perds quinze kilos, j’aurai plus d’énergie, j’aurai une meilleure santé, je pourrai acheter des vêtements plus élégants, je n’aurai plus peur du regard des autres, etc… Parmi les désavantages à perdre mes kilos, je ne vais plus pouvoir manger ces délicieux petits pots de glace au chocolat que j’adore, je vais rater mes programmes TV favoris quand je serai à la gym, je ne vais plus pouvoir aller avec mes amis ou amies à notre pâtisserie favorite, etc…

Si je reprends mon exemple d’animateur radio, je peux lister comme avantage un vrai salaire qui me permet d’être indépendant, vivre dans mon propre appartement, recevoir mes amis quand je veux, être libre de me coucher quand je le désire, etc… De mon point de vue, comme désavantage je listerais devoir nettoyer mon appartement, faire ou acheter mes repas, laver mon linge et toute la gestion des nouvelles dépenses incluses dans la location de mon studio.

Choisissez votre succès

Quand vous avez fini vos deux listes, comparez-les et demandez-vous si ça vaut vraiment le coup de changer votre vie. Peut-être que oui, peut-être que non. Mais l’avantage de faire cette liste est que vous ne pouvez plus vous cacher. Vous devez prendre vos responsabilités. Dans de nombreux cas, quand vous regarderez vos listes vous sourirez en faisant la comparaison. Bien sûr que le changement est meilleur. En les mettant sur papier, vous ôter à vos peurs leur pouvoir sur vous.

Finalement, après ce premier exercice qui a pour but “d’exorciser” ces peurs plus virtuelles qu’autre chose, je vous encourage à aller plus loin. Imaginez-vous ayant réussi votre pari. Imaginez-vous svelte, recevant vos premiers bénéfices ou frappant à la porte de votre rendez-vous romantique. Que ressentirez-vous?

Après de nombreuses hésitations, j’ai finalement envoyé mon CV audio à des stations pro. J’ai été embauché, j’ai eu un peu peur mais la sensation de réussite et de liberté qui suivit fut trop bonne. En plus, cette simple action m’ouvrit des perspectives que je n’aurai jamais pu imaginer même dans mes rêves les plus fous. Un jour, il faudra que je vous raconte ça.

On dit que la chance sourit aux audacieux. La phrase est un peu simpliste mais je pense que l’idée est vraie. Il faut y aller. Il faut saisir votre opportunité. Levez-vous et commencez ! Perdez ces kilos. Enregistrez-vous comme auto entrepreneur. Allez lui parler sur la piste de danse. Cette décision toute simple vous ouvrira des portes insoupçonnées.

(Photo: Paulo Brandão)

Commentaires

20 commentaires pour “La peur de réussir”
  1. LaForêt says:

    Merci.
    Merci de reconnaître ce défaut même aux plus entreprenants, qui ne rechignent pourtant pas ni à la tache ni aux responsabilités.

    Je vous dirai bientôt le résultat de ma liste à 2 colonnes 😉

  2. Jean-Philippe says:

    Merci LaForêt! Je suis curieux de voir ce que cela va donner…

  3. Manau says:

    Merci bcp Jean-Philippe !

    c’est vraiment cette peur de réussir, et surtout l’équation changement = danger qui empêche énormément de gens (et j’en fais parti… :s mais j’essaie encore) d’atteindre leurs buts…

    JP, j’ai une petite question : avant d’aller au japon, ca vous a pris combien de temps pour enfin prendre l’ultime décision de changer de vie ??

  4. Jean-Philippe says:

    Merci Manau!

    C’est une question à laquelle il est difficile de répondre parce que l’idée de changer s’est formée petit à petit, avec des reculs et des avancées. En gros, je dirais que cela m’a pris 5 ans entre le moment où l’idée a commencé à germer et le jour où j’ai eu mon billet d’avion entre les mains. C’était d’ailleurs à destination de l’Amérique du Sud, car en tout j’ai changé 3 fois de continent et donc 3 fois de vie. 🙂

    Bonne chance Manau! C’est comme pour tout, c’est la première fois qui est la plus difficile… mais le jeu en vaut la chandelle, car après on se sent si libre. 😉

  5. LaForêt says:

    Je viens de découvrir une vidéo de quelques-uns qui “l’ont fait”. Yatta !
    Ils sont japonais … et très surprenants pour l’européenne que je suis 🙂

    http://www.dailymotion.com/video/xx279_happatai-yatta_fun

  6. Jean-Philippe says:

    Merci beaucoup LaForêt! 🙂

    Les japonais restent de grands enfants et aiment s’émerveiller avec des choses toutes simples. Dans ce cas précis, cette chanson de 2001 est quand même à prendre au second degré! Pour plus d’info:
    http://fr.wikipedia.org/wiki/YATTA!

  7. Valérie says:

    Je crois que ce qu’il y a de plus important c’est de croire en soi et de se dire que l’on a droit à l’erreur. Pour autant on ne va pas s’arrêter de vivre !
    Nos souhaits, désirs etc… ne sont pas des défis ou des duels à l’épée ou au tir.
    Et surtout et par dessus tout on n’est jamais seul(e) dans la vie. Il y aura toujours une rencontre sur notre chemin c’est sur ! Et si ce n’est pas une rencontre avec un être et bien c’est notre rencontre intérieure.

    En fait dans une technique candienne de counseling (accompagneemtn de la personne dans son projet personnel et professionnel) il y a un exercice extraordinaire qui vous fait prendre conscience qu’il y a la réalité d’un côté et de l’autre nous et nos désirs. Le but c’est de rapprocher les deux.
    Et qu’au fur et à mesure que l’on ordonnance le tout et bien on s’aperçoit que nos désirs ne sont vraiment pas si eloignés de la réalité et qu’ils sont absolument réalisables !
    Finalement c’est l’idée que l’on s’en fait tout simplement ! C’est ahurissant cette technique ! Je l’ai essayé et j’ai été bluffée. Comme quoi !!!!!! Les freins c’est nous qui nous les mettons !

  8. Jean-Philippe says:

    Merci Valérie pour votre commentaire !… mais là vous nous rendez curieux. Quelle est cette technique ? Peut-on avoir un lien sur le net ? 😉

  9. Valérie says:

    C’est la technique de l’ADVP ou Activation du Développement Vocationnel et Personnel de nos chers amis les Québécois ! Université de Laval.
    En fait la technique est très ludique dans son approche car construite en plusieurs étages d’une fusée ! Et à chaque étape on doit réfléchir à un ordonnancement de nos désirs. Et lorsque l’on arrive en haut et bien il n’y a plus qu’à passer à l’action car nous avons sauté toutes les barrières !
    Je n’ai pas de lien à ce jour car j’ai eu la chance que l’on me transmettre cette tehnique en formation. J’aurai bien voulu aller au Canada !!!!! Mais bon le Canada est venu à notre groupe ce jour là !
    Sur le net on doit trouver beoucoup d’explications.
    Une pensée et un grand merci à nos amis les Canadiens dont j’apprécie beaucoup leurs démarches d’accompagnement.

  10. Elie says:

    Merci pour ce bel article, Jean-Philippe.

    Je dois avouer que, j’ai rarement été jusqu’au bout de mes objectifs, mais cette idée de classer les avantages et inconvénients dans deux colonnes pourrait bien m’être utile.

    De plus, les deux commentaires de Valérie sont très intéressants, et utiles d’ailleurs.

  11. Marc says:

    Bonjour Jean-Philippe,
    Merci d’avoir publié cet article. Je trouve que tu es très talentueux pour communiquer tes idées. Le texte est clair, bien articulé, succinct­ et fort pertinent. Combien de temps ce texte t’a-t-il demandé? En plus, tu ne te contente pas de seulement livrer un contenu théorique, mais tu l’as appliqué personnellement.
    Bravo!

  12. Eric ROLLAND says:

    Bonjour Jea Philippe,
    en core un super article.

    Pour illustrer la peur de réussir, je cite souvent cette anecdote entendue d’un confrère.

    L’histoire d’un homme qui s’était fixé comme but dans la vie de devenir Directeur France d’un établissement, et ce, dès son entrée dans l’entreprise.
    Son parcours a été échelonné de réussite, poussé par son ambition.
    Au bout de 15 années à faire ses preuves, les efforts paient, et le poste lui est proposé.
    Au bout de 6 mois, l’homme tombe en dépression: que lui reste-t-il à prouver, à atteindre?
    (je crois que c’est une histoire vraie)

    Pourquoi avons nous peur de réussir:
    l’une des raisons est qu’à atteindre ses buts, il faut s’en fixer d’autre. Le fait de ne pas parvenir à réussir nous donne ainsi l’assurance d’un objectif à atteindre.

    Oui, je sais, c’est pervers….

  13. marie says:

    wouahhhhhhhhh c’est article m’a foutu un gros vent en pleine face ‘je ne sais pas si on me comprends) !! mais oui affronter ses peurs , les lister!! mais oui je vais faire ça!! je suis tres admirative de mon mari il me dit souvent quand tu veux et que c’est dans ta tete tu y arrives ne lache pas c’est tout!! ça fait 10 ans qu’il voulait ravoir une nouvelle moto , les enfants , la maison , les sous aussi…on fait que c’était pas possible à ce moment là et voilà ça y est il a eu ça bécanne, et il me dit tu vois j’ai mis le temps mais je l’ai eu!!! faut pas d’ésperer tout vient à point à qui c’est attendre!! j’adore ce dicton!!en tous cas je vais faire ce que vous dites et je vais méditer dessus!! pour finir juste c’est vrai que la peur est difficile à controler mais pour me calmer je fais de l’acupuncture et je me sens mieux c’est étape!!!

  14. Jean-Philippe says:

    @Eric Rolland Merci pour cette histoire qui doit arriver des milliers de fois dans le monde chaque année. De quoi nous faire méditer encore et encore sur nos buts réels. 😉

    @marie Merci aussi pour l’histoire (qui est du vécu !) et bravo à votre mari pour les belles leçons de vie qu’il vous apporte. 🙂

  15. PetLover says:

    Oui cela me fait penser à mon ex, entomologiste et chasseurs de papillons rares en amazonie et partout où il pouvait partir. Il m’a dit un jour que durant tous ses périples il avait rencontré maintes fois des “aventuriers” qui avaient eu un rève dès leur jeune age: partir faire le tour du monde et s’installer loin, en Amazonie ou ailleurs. Ils l’ont fait. Mais une fois le rève atteint tous étaient en grande dépression… car ensuite? On fait quoi maintenant qu’on a réalisé son rève?

    • Merci beaucoup PetLover pour ce partage personnel ! Je connais bien ces aventuriers puisque j’ai moi-même vécu plusieurs années en Guyane (mais pas en temps qu’aventurier !) et j’en ai rencontré plusieurs. Souvent même, ils finissaient par faire une “bêtise” avec la loi, histoire de se redonner un challenge… 🙂

      • PetLover says:

        oui voilà…. c’est impressionnant… comme si ensuite entrait en jeu aussi l’ennui de la vie elle-meme…. D’ailleurs, cela va peut-etre vous surprendre mais parmi ces gens il a y beaucoup de surdoués, souvent pas diagnostiqués dans leur jeune age et qui ont toujours quelque chose qui doivent prouver à eux-meme ou… aux autres…..

        • Ça ne me surprend pas ! J’ai eu le plaisir d’avoir beaucoup de visites de leur part lorsque j’avais parlé des scanneurs. Si vous êtes vous-mêmes surdouée, je vous recommande cette communauté, Zebra crossing. 😉

          • PetLover says:

            Heu ben…. il parait que j’en fais parti oui…. et que justement on me parle beaucoup d’inhibition intellectuelle et de peur de la réussite… C’est en voulant en savoir plus que je suis tombée chez vous et c’est très cool. Je suis justement en train de faire les deux colonnes… 🙂 ça à l’air de marcher pas mal…..

            Pour Zebra crosssing je connaissais… Ils sont très connus ces petits zèbres là à ce que je vois!

            Marrant pour les nombreuses visites… alors qui se ressemble s’assemble vraiment apparemment… 🙂

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